Par Zachari HAMAN
Localisés au Cameroun, Tchad et Cote
d’Ivoire, les Guidar sont un peuple venu du Sud-Soudan, faisant groupe avec les
Néo-soudaniens tels que : les Guizga, Moundang, Mousgoum, … Au Cameroun,
on les retrouve en majorité dans la Région du Nord, le département du
Mayo-Louti (Guider) où ils fondent un lamidat. Dans ce département, les Guidar
sont cantonnés au pied des montagnes.
Comme tout
autre peuple du monde, les Guidar sont reconnus par différents traits culturels
à l’instar des danses, mets, rites et coutumes.
Parlant des
danses notamment, on y retrouve différents types :
- La danse
du Guma
La danse du Guma ou danse Guma se pratique au rythme
d’un grand tambour appelé « Guma », taillé à base du bois à la taille
du batteur. Cette danse a pris ses
origines pendant la période d’invasion coloniale (occidentale et peule). Durant
cette période, les Guidar, pour vaincre l’ennemi, ont adopté ce type de danse.
Elle est composée de : un tambour taillé à la taille du batteur (ceci pour
permettre à ce dernier de se cacher derrière pour échapper aux flèches et
autres attaques) ; des lances avec lesquelles les hommes dansent derrière
les filles ; des cachots permettant aux filles de protéger leur partie
intime. La chorégraphie est faite de telle sorte que les filles se placent
devant, les hommes derrière elles et le batteur au fond de ceux-ci. Une fois
l’ennemi en vue, le batteur change de rythme. Ce faisant, le signal est alors
donné aux filles de faire tomber leurs pagnes. L’ennemi, face à ces filles
dépouillées de leur intimité, passe son temps à contempler la beauté de la
nature ce qui donne le temps aux populations de fuir et de se cacher dans les
grottes. Pendant que l’ennemi passe son temps à observer, les danseurs
l’attaquent avec leurs lances.
Cet outil de danse a été utilisé plus tard dans la
communication : lors de l’annonce des fêtes traditionnelles, de la
naissance des jumeaux, d’évènements nouveaux dans les villages, du décès du
chef traditionnel, …
Aujourd’hui, cette danse est utilisée dans les
meetings politiques, lors des tournées de l’autorité compétente ainsi que lors
d’une visite d’un chef d’État au Cameroun (Président Chinois par exemple,
2005). Cette danse a aussi été utilisée pour représenter le Cameroun pendant
plusieurs années lors de la commémoration du 14 juillet en France.
- Le
Kokou ou danse de Kokou
Danse faite au rythme d’un instrument en forme de guitare
(à deux fils) qui consiste à chanter et glorifier une personnalité quelconque
dans l’optique de mendier par exemple.
- Le
Gazanvela
L’instrument utilisé est le même que précédemment,
mais à la seule différence qu’on emploie un nombre d’acteur plus important. Des
hommes bien robustes et les femmes aux voies étincelantes sont choisis ;
les premiers pour être danseurs et les second pour chanter. .
- Le
Pozloro ou danse de Pozloro
Il s’agit d’une sorte de flute qui est fabriquée à
base d’une tige de sorgho (blanc ou rouge essentiellement). Cette danse
consiste aussi à chanter pour louer ou magnifier le chef ou une personnalité
importante.
- Le
Deguela
L’instrument utilisé ici est de taille réduite par
rapport au Guma. Le batteur le maintien entre ses cuisses. Les danseurs quant à eux
utilisent un autre outil fait à base de coquille d’escargot et de la cire.
Ceux-ci chantent tout en tournant en ronde autour du batteur. Le batteur change
de rythme, laissant place aux hommes de montrer leur robustesse. Ceci en
donnant un coup de pied à celui qui se trouve devant.
Notons au bas de cette description que toutes ces
danses sont exécutées à des périodes
bien déterminées de l’année. Et pour compléter ce qui est dit plus haut, nous
avons entre autre : Le Guma et le Pozoloro qui s’exécutent lors de la fête
du village et des jumeaux ; le Deguela, lors de la fête des récoltes et
des funérailles ; le Gazanvela, lors de toute autre cérémonie de grandeur
nature. Au-delà du caractère culturel, ces différentes danses revêtent des
aspects sociaux ; ceci parce qu’elles constituent un lieu de rencontre
entre des personnes de divers horizons du Pays Guidar mais surtout que les
hommes à la recherche d’une conjointe en trouvent facilement le moyen d’en
aborder en ces lieux et par là, avoir « la chance de s’en procurer
une » au final d’une telle manifestation.
- Les rites
traditionnels
Notons que, chez les Guidar, les rites traditionnels
différent en fonction des temps, des villages, des familles… Pour cela nous avons
plusieurs groupes à savoir :
* Les rites organisés par le chef
traditionnel ou chef de terre
Ceux-ci sont organisés pour un but collectif du
village. Par conséquent, le chef de terre fait venir un féticheur (mǝsǝkheligi) qui invoque les dieux des ancêtres
afin de pouvoir prédire ce qui peut advenir de bon ou de mauvais dans le
village. Cela arrive le plus souvent lors de l’approche des fêtes
traditionnelles du village. On note essentiellement : les cas
d’empoisonnement occasionné par un ennemi et des cas de sorcellerie
(maladies, malédiction…). C’est souvent pourquoi dans les mythes du pays kaɗa on a attendu qu’un village a causé
une maladie quelconque dans un autre. Après s’être informé par le féticheur, le
chef du village annonce la nouvelle à son messager qui à son tour pourra relayer
l’information auprès des familles. Le plus souvent, le messager passe
l’information par un appel sonore (wǝtǝlma)
au sommet d’une montagne ; ou alors le messager peut passer maison par
maison, chose difficile à faire.
Aussi, le chef de terre peut faire appel à son
féticheur pour préparer les fêtes de début de saison pluvieuse et de
récoltes ; ceci pour chasser le malheur du village ou pour bénir le
village. Parlant de la fête du début de saison pluvieuse, le féticheur
recommande davantage aux habitants de bénir leurs champs avec soit de la
cendre, soit avec du sang des animaux (poulet, mouton…). Pour la fête de
récolte, le féticheur peut faire des présages non heureux pour le village à
l’instar de l’arrivée de la famine. Quitte à chaque famille de se préparer en fonction
de la situation annoncée.
Aux cotés des ces rites traditionnels, s’ajoutent
les feux de brousses qui sont effectivement organisés sous les ordres du chef
du village. Ces feux annoncent la fin de la saison pluvieuse même comme par
moment l’on note des pluies qui viennent arroser les dégâts causés par ces
derniers. Les gens sont alors appelés à se retrouver quelque part pour
allumer ces feux. On y récolte
essentiellement les criquets, les souris et autres rongeurs, etc.
* Les lites organisés individuellement
par le chef d’une famille
Le chef d’une famille, en fonction des circonstances
éprouvées ou des événements qu’il aimerait organiser, fera appel au féticheur pour avoir une vision
nette de la chose. A titre illustratif, le père d’une famille peut faire appel
au féticheur suite au décès d’un enfant pour savoir les causes du décès de l’enfant ;
ou encore, le chef de famille peut aussi faire appel au féticheur pour avoirs
des éclaircies sur le décès de son/sa petit (e) fils/fille. Notons que, le père
de famille doit prendre des dispositions pour éviter que de telles situations retouchent
encore sa famille. Dans la plus part des cas, si c’est un (e) sorcier (e) qui a
causé le préjudice à sa famille, il peut
aller jusqu’à chercher l’élimination de cette dernière.
* L’idole
Les
Guidar, pour implorer leur Dieu, conçoivent une sorte d’idole à base d’un
canari dont le bas est troué. Le canari est alors renversé et rempli de terre.
Le tout est appelé tuya. L’on procède alors à la bénédiction par des sacrifices
d’animaux (poulet essentiellement). La bénédiction se fait soit avec du sang soit
avec du foie braisé. Le père de la famille étant le garant de la tradition
exécute les rites tout en prononçant des porales invocateur du Dieu.